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Eva Zimmermann


Baden-Baden
„La capitale d‘été de l’Europe“

Genèse et transformation d’un espace transculturel (1830-1880)

Déjà dans les années 1980, l’historien Paul Gerbod soulignait l’importance du thème des villes d’eaux au 19e siècle pour la recherche historique. Il qualifia les grandes stations thermales, dites hydropoles, de « microcosmes sociaux » où se mêlaient d’une manière singulière les nationalités, les catégories sociales, les générations et les sexes. Les responsables du projet Great Spas of Europe, actuellement en cours, qui a pour objectif une candidature transnationale sérielle pour la reconnaissance comme patrimoine mondiale de l’UNESCO, avancent des arguments similaires. En plus de l’héritage architectonique, ils se réfèrent surtout au patrimoine culturel immatériel des « villes thermales européennes emblématiques », qu’ils caractérisent comme des laboratoires du monde moderne. Il est donc surprenant que, jusqu’à présent, les historiens aient largement ignoré le potentiel d’une approche transnationale dans le contexte du thermalisme. Cette thèse a pour but de combler ce manque.

Alors qu’au début des années 1830, la petite ville de Baden-Baden, située près de la frontière française, était à peine connue à l’international, elle conquit peu après la réputation de la « reine des eaux ». Outre les conditions topographiques favorables et l’expansion rapide du réseau de chemin de fer, ce succès était dû en grande partie aux tenanciers des jeux de hasard, parisiens d’origine, et nommés la « dynastie Benazet ». Durant le temps de leur bail, de 1839 à 1872, le gouvernement badois leur accordait une grande marge de manœuvre, qu’ils épuisèrent autant qu’ils exploitèrent leurs réseaux étendus transnationaux. Leurs vastes initiatives culturelles, telles que la promotion du théâtre, de la musique et de la littérature, ainsi que l’organisation de fêtes et de courses de chevaux, étaient soutenues par de grosses campagnes de publicité. En plus, leurs dispositifs concernaient la transformation et le réaménagement de l’espace public. Peu après, la ville passa pour la « petite sœur de Paris » et finalement pour la « capitale d’été de l’Europe ».

Ce développement entraîna de nombreux et divers processus d’échanges embrassant une grande variété de phénomènes culturels et sociaux, tant matériels qu’immatériels. Les activités d’échanges avaient lieu non seulement au niveau transnational, mais aussi entre les différentes couches sociales, et impliquaient beaucoup d’acteurs différents. Ils pouvaient se manifester sous différentes formes, allant d’une acculturation, plus ou moins évidente, dans le cadre des pratiques socioculturelles, à des exemples de transferts ciblés de connaissance ou de transfert culturels et leurs manifestations dans l’espace physique, en passant par l’appropriation, soit-elle volontaire ou involontaire, des habitudes. Dans leur multitude et leur concentration, ces processus peuvent être compris comme des éléments constitutifs et structurels d’une hybridation culturelle. Bien sûr, tout cela s’accompagnait de multiples négociations, parfois conflictuelles, qui pouvaient être facilitées ou entravées par des événements et des réalités tant à l’extérieur qu’à l’intérieur de l’espace en question. De plus, le développement de Baden-Baden, et dont surtout l’interpénétration culturelle, faisait l’objet de controverses dans les médias. Tandis que des journalistes français vantaient la ville comme étant un modèle de cosmopolitisme et un pont entre les nations, une grande partie de la presse allemande se plaignait de la dominance de l’élément français au sol allemand, du mélange des mœurs et des mentalités, et de la disposition démesurée de la population de Baden-Baden à s’assimiler. La guerre franco-allemande de 1870/71 et la prohibition des jeux de hasard dans l’Empire allemand en 1872 marquèrent un tournant dans l’histoire de la ville, qui est communément désignée comme « la fin de l’époque française ».

En adoptant une approche multidimensionnelle, la thèse cherche à démontrer la genèse et la transformation des structures transculturelles au 19e siècle à l’instar de Baden-Baden. Il s’agit de faire ressortir les facteurs et les mécanismes qui contribuaient à la formation d’un espace d’hybridation culturelle, de démontrer le dynamisme qui l’animait et qu’il dégageait, mais aussi de révéler les conflits d’intérêts et les limites de l’interpénétration culturelle. En l’occurrence, l’étude prend essentiellement en considération les divers acteurs intéressés, ainsi que le rôle et la modification potentielle des perceptions d’autrui dans le contexte de la rencontre interculturelle. L’analyse repose sur un modèle de l’espace qui emprunte à Henri Lefebvre la dialectique tridimensionnelle de la production de l’espace, à Pierre Bourdieu la théorie de l’espace social et des effets du lieu, et prend en compte le concept d’hétérotopie de Michel Foucault, jusqu’ici plutôt négligé par la science historique.

Curriculum Vitae

  • Depuis 09/2015: Vacataire dans le projet de recherche IC Translor - Cultures transfrontalières / Räume der Grenze (Université de Lorraine, CNRS)
  • 05/2015-07/2015: Bourse de recherche doctorale de l'Institut Historique Allemande (IHA) à Paris
  • Depuis 2014-1015: Doctorante en cotutelle avec l’Université de Lorraine (école doctorale Fernand Braudel / CEGIL)
  • Depuis 2013: Bourse de doctorat – Elsa-Neumann-Stipendium des Landes Berlin
  • 2011: Diplôme de Magister Atrium en histoire avec la thèse : Les autodafés d’écrits dans la France prérévolutionnaire
  • 2003-2011: Etudes d’Histoire, de la Littérature générale et comparée et de la Philologie française

Publications

  • „,Französisch-deutsche Gränzliteratur‘—Die Zeitschrift Illustration de Bade (1858-1867) als Medium des Kulturaustauschs“, in: Silvia Richter, Maude Williams (Hrsg), Der Austausch / L’échange,Peter Lang, Coll. Convergences, 2016 (publication en cours).

  • “Crossing Territorial Borders and Social Boundaries? Observations on the German and French Workforce in the Spa Town of Baden-Baden, c. 1840-1870”, in: Elisabeth Boesen, Gregor Schnuer (Hrsg.), European Borderlands: Barriers and Bridges in Everyday Life, Ashgate Publishing, 2016 (publication en cours).

Conférences

  • 11/2015: "Auseinadersetzungen mit dem NS in der französischen Tagespresse (1922-1929). Colloque international "Confrontations au national-socialisme" - Université de Lorraine (CEGIL) / FU Berlin (FMI) / Paris-Sorbonne (Labex EHNE). 
  • 01/2015: « Baden-Baden – Sommerhauptstadt Europas. Zur diskursiven Konstruktion einer transnationalen Heterotopie (1840-1872). » Congrès: « Spaces and Borders in Modern German History : Negotiations, Conflicts, Cooperation » - Centre du recherche sur l’antisémitisme du TU Berlin / University of Cambridge.
  • 11/2014: « Seasonal Cross-border Workers in the Spa Resort of Baden-Baden (1840-1870). » Congrès: « Living in European Borderlands » - Université du Luxembourg.

contact

evsn[at]zedat.fu-berlin.de